
La cérémonie de lancement du DDR a eu lieu le 6 novembre 2018
Depuis
son indépendance en 1960, le Mali connait des rebellions cycliques de groupes
irrédentistes dans le Nord du pays. Pour résoudre ces différents conflits, une
série d’accords ont été signés (Accord de Tamanrasset du 6 janvier 1991, le
Pacte national du 11 avril 1992, l’Accord d’Alger du 4 juillet 2006, l’Accord
de Ouagadougou qui a permis le retour à une vie constitutionnelle normal en
2013).
Et,
après la crise de 2012, la communauté internationale, avec comme chef de file
l’Algérie, s’est engagée auprès de Bamako dans une démarche qui a conduit le
gouvernement du Mali et les groupes armés à signer, le 15 mai 2015 et à
parachever le 20 juin 2015, à Bamako, l’Accord pour la paix et la réconciliation
nationale issu du processus d’Alger (APR).
Alors
que le DDR, qui a pour objectif principal d’accueillir, de désarmer les
ex-combattants, de collecter leurs armes et d’aider à leur réinsertion dans la
vie civile, devait commencer 60 jours après la signature de l’Accord, soit en
septembre 2015, c’est trois ans plus tard qu’il débute. Sa cérémonie de
« lancement » a eu lieu le 6 novembre 2018. Celle-ci a, en outre, été
mouvementée, puisque les ex-combattants ont retardé de plusieurs heures son
démarrage effectif, exigeant des garanties supplémentaires.
Cet
épisode a, une nouvelle fois, illustré les blocages répétés du processus de DDR
au Mali, qui s’était engagé en fait sans échéancier clair sur les étapes à
venir. Faisant un état des lieux sur le DDR au Mali, un texte de la Commission
nationale de désarmement, démobilisation et réinsertion (CNDDR) avance les
raisons des retards et de présente les obstacles.
La
question du DDR avait, déjà, été abordée dès les Accords préliminaires de
Ouagadougou de 2013, sans pour autant en définir les modalités. C’est l’Accord
de paix d’Alger de 2015 qui présente des mesures en vue d’un réel désarmement
et du redéploiement des Forces de défense et de sécurité (FDS) dans le Nord du
Mali, offrant une liste et un calendrier de mesures.
Entre 2015 et 2018, quelques avancées ont été enregistrées dans la préparation des structures d’accompagnement et de mise en œuvre du DDR, tandis que des questions centrales ont été laissées de côté et que la situation sur le terrain a évolué, posant de nouveaux défis.
DDR
ET PROCESSUS DE PAIX - Si les opérations de DDR n’ont commencé qu’en 2018, la
CNDDR a été vite mise en place : nomination d’un coordonnateur national
appuyé de vice-coordonnateurs issus des mouvements armés, mise en place des
structures et bureaux régionaux, embauche et formation du personnel,
élaboration de la stratégie. Huit sites de cantonnement ont été construits dans
les Régions du Nord. Parallèlement, les partenaires financiers ont mobilisé US$
21 millions à travers un Trust Fund, administré par la Minusma.
En
parallèle, les « mesures de confiance » prévues par l’Accord, comme
conditions préalables au DDR, sont négociées entre les parties avec l’appui de
la Médiation et des forces internationales déployées au Mali dans le cadre du
Comité de suivi de l’Accord (CSA), de la Commission technique de sécurité (CTS)
et sur le terrain. La principale mesure de confiance est la mise en place de
patrouilles mixtes entre groupes armés et Forces armées maliennes, sous
commandement unifié du Mécanisme opérationnel de coordination (MOC), dont la
responsabilité est de restaurer la confiance entre les parties et de sécuriser
les sites de cantonnement dédiés au DDR, et ce sans désarmement.
Après un
accord entre les parties en juillet 2016 sur les modalités de mise en place et
de déploiement du MOC dans les Régions de Gao, Kidal et Tombouctou (Nord),
incluant en particulier les modalités d’un « DDR accéléré » pour les
ex-combattants qui seront intégrés dans les bataillons du MOC, un premier MOC
est établi en janvier 2017 à Gao. L’effectif prévu (600 hommes) est étoffé pour
intégrer des membres des groupes non-signataires « coopératifs » en
plus des groupes signataires et forces gouvernementales.
L’attentat
du 18 janvier 2017 contre le camp du MOC de Gao a porté un sérieux coup à son
déploiement et à son opérationnalisation, notamment en entraînant une
reconsidération des mesures de sécurité nécessaires. Les MOC de Tombouctou et
Kidal sont finalement établis en mai 2018, après maintes négociations. Ils
restaient toutefois peu opérationnels et constituaient en fait une cible
privilégiée des attaques.
L’accord
sur les modalités de déploiement et d’opérationnalisation du MOC stipule que
les groupes armés doivent contribuer en armes lourdes, mais ceux-ci s’y
refusent ; la question de la prise en charge des ex-combattants (frais de
subsistance, frais médicaux, uniformes, etc.) qui devait être résolue à travers
le DDR accéléré et l’intégration accélérée dans les Forces armées maliennes
(FAMa) des ex-combattants membres du MOC n’a pas fait de progrès entre juillet
2016 et mars 2018.
Un an et demi de retard pour le déploiement des MOC engendre d’autres délais et blocages : un nouvel appel aux bailleurs a dû être fait alors que les MOC sont entrés en grève en janvier 2018 devant la diminution de leurs allocations suite à l’épuisement des fonds.
RELANCE
- Une Feuille de route, signée en mars 2018, après deux mois de négociations,
entre le gouvernement, la CMA et la Plateforme, met en place un nouvel échéancier
des actions liées au processus de paix, celles qui doivent être adoptées ou
réalisées avant les élections présidentielles et celles qui seront mises en
œuvre après les élections. Cette Feuille de route marque une relance du
processus, tandis que les parties signataires préparent l’élection
présidentielle et font face à de multiples pressions
internationales (renouvellement du mandat de la MINUSMA, nomination d’un
observateur indépendant, établissement d’un régime de sanction onusien, etc.)
La Feuille de route prévoyait le déploiement complet des MOC à Tombouctou et Kidal pour mars 2018, l’enregistrement des ex-combattants pour le DDR pour avril 2018, et le regroupement des ex-combattants pour le DDR accéléré pour août 2018. Aucune de ces dates n’a été respectée : le déploiement des MOC a été effectif en mai, l’enregistrement des ex-combattants en septembre et le regroupement des ex-combattants pour le DDR accéléré en novembre.
Dès
mars 2018, la CNDDR multiplie les remises de registres aux groupes armés.
Face
aux problèmes sur le terrain, les membres de la CNDDR, y compris son président
d’alors, Zahabi Ould Sidi Mohamed, visitent les régions concernées pour
faire lever les barrières et renforcer la confiance sur le terrain. À ce
moment, aucun quota n’est déterminé pour les groupes armés, laissant un flou
sur la capacité d’absorption pour l’intégration ou la démobilisation.
Alors
qu’une étude de la Banque mondiale estimait qu’environ 10.000 combattants
devraient être désarmés, le nombre de combattants enregistrés atteint 32.000.
Cette inflation est en partie liée à la stratégie d’apaisement de la CNDDR. Des
groupes non-signataires et au moins un groupe non-armé, la Force G, ont reçu
des registres. La CNDDR n’avait donc pas tranché sur les qualifications nécessaires
pour être reconnu comme combattant, acceptant l’inscription de combattants sans
vérification des armes.
Le
6 novembre, le « DDR accéléré » est lancé qui vise la démobilisation
des 1.500 ex-combattants du MOC, le profilage des candidats et l’enregistrement
de leurs armes, avant leur intégration et mise à disposition du MOC, selon les
modalités établies en juin 2016.
À
la fin du DDR accéléré, les éléments resteront sous commandement conjoint du
MOC, mais seront pris en charge aux mêmes conditions que les membres des FAMa.
Le MOC n’a visiblement pas réussi à remplir une de ses vocations
initiales : « sécuriser les sites de cantonnement du DDR ». À
Gao, le DDR accéléré s’est achevé le 26 novembre avec 515 inscrits dont
seulement 4 ex-combattants choisissant le retour à la vie civile. Le processus
était toujours en cours à Tombouctou et Kidal à cette date. Alors qu’il n’y
avait pas de date prévue pour entamer ce qui devrait être la prochaine étape,
le rappel des « déserteurs » des FAMa. Il en est de même pour les
candidats au DDR enregistrés.
À chaque étape du DDR, l’absence de confiance entre les parties entraîne des délais. Le gouvernement met la pression sur le DDR. De leur côté, les mouvements armés exigent davantage de garanties sur la décentralisation et le développement dans le Nord du Mali en retour de leur participation à l’avancement des mesures de confiance en matière de sécurité et de défense, utilisant le DDR comme levier de négociation et gardant les éléments les plus fidèles près d’eux.
La
dégradation de la situation sur le terrain avec des combats sporadiques entre
CMA et Plateforme a alimenté des lenteurs du processus et des réticences des
groupes. Plusieurs retards sont dus à la renégociation constante du processus,
notamment avec la multiplication des groupes armés. La présence au sein du DDR
de groupes qui ne participent pas au CSA et qui ne se reconnaissent pas dans la
Plateforme et dans la CMA crée un processus à deux vitesses, dans lequel le DDR
devient une fin en soi, plutôt qu’un moyen pour arriver à une paix durable.
En
mars 2018, sommés d’enregistrer leurs membres sous l’une des deux coalitions de
mouvements signataires de l’Accord, ces groupes armés ont refusé cette
affiliation forcée, laissant planer le doute sur la manière dont ils seront
intégrés à un processus défini en fonction de la logique d’un conflit qui a
évolué depuis lors, notamment sur la question des quotas qui seront attribués.
La multiplication des attaques terroristes contre des représentants de l’État malien et des forces internationales a créé aussi des délais importants. Les normes sécuritaires des sites de cantonnement construits sont devenues désuètes devant les nouvelles menaces, entraînant des coûts et des travaux supplémentaires. Toute la stratégie du DDR, incluant la sécurisation des sites de cantonnements par le MOC a donc dû être reconsidérée.
DÉFIS
ET PROBLÈMES - Les vrais défis ont commencé, en fait, d’abord, quand il a fallu
gérer les attentes de près de 32.000 personnes qui, parce que leur noms
apparaissent dans un registre, se voient déjà incluses dans le processus. Si la
question a été abordée par les différents partenaires, à l’époque (et même
aujourd’hui) personne ne sait comment identifier les « vrais »
combattants.
À Gao ou à Sévaré, plusieurs jeunes avaient déjà payé entre 5.000
à 50.000 Fcfa pour être intégrés à des groupes. Que leur inscription soit
frauduleuse ou une tentative d’assurer leur avenir économique, le processus de
sélection, avant même de rejoindre les activités de DDR, allait faire des
insatisfaits, même si des critères de sélection ont été établis et rendus
publics (appartenance à une unité combattante d’un mouvement signataire,
expérience, âge limite des grades, ne pas être sous enquête judiciaire).
Ensuite,
l’attribution des rangs et des avantages afférents, reste un des grands échecs
des programmes de DDR de 1996 et 2006 au Mali. À cette époque, la désignation
du rang des intégrés s’était faite sans transparence et de manière non
inclusive. Par la suite, les intégrés ont dénoncé à plusieurs reprises une
discrimination en termes de progression de carrière. Alléguant de frustrations
liées au plan de carrière, d’être marginalisés, prétextant ce sentiment amer,
plusieurs d’entre eux ont déserté lors des évènements de 2012. Ces déserteurs,
qui ont combattu dans les rangs des groupes armés, réclament des arriérés de
salaires, d’attribution de rang et de privilèges de retraite.
Aujourd’hui
encore, les modalités d’attribution des rangs des nouveaux ex-combattants
restent encore imprécises. Dans les registres, plusieurs ex-combattants ont
déclaré un rang, sans que celui-ci soit confirmé par les groupes armés ou par
une expérience de combat avérée – question qui a été litigieuse dans les MOC.
Un
autre défi reste la capacité d’absorption des Forces de sécurité. Les FAMa
avaient commencé un travail de réflexion, mais on ne savait toujours pas
comment les autres corps (gendarmerie, protection civile eaux et forêts,
douanes, etc.) pourront inclure des ex-combattants. L’absence de quotas définis
rend la question encore plus complexe. Les intégrations ont un coût et il a été
difficile, pour chacune de ces institutions, de s’y préparer sans avoir un
chiffre. Mais, au-delà des questions budgétaires, il aurait fallu aussi que les
différents corps de sécurité préparent une stratégie pour éviter les échecs des
années 1990.
Le
Pacte national de 1992, qui a mené à la Flamme de la Paix, avait misé sur des
politiques où les intégrés sont restés dans des unités spéciales dédiées à la
sécurisation dans le Nord du Mali, minant la cohésion des intégrés.
Aujourd’hui, on peut s’interroger sur : l’accompagnement des démobilisés pour
éviter l’expérience des années 1990, l’échec de leur réinsertion économique et
la reprise des armes. Quid des tensions toujours plus vives quant à la
réintégration des déserteurs?
Finalement,
il aurait fallu des formations et partenariats pour renforcer les FDS
maliennes, transcender la crise de confiance dans les rangs, liés aux échecs
dans le Nord et aux conflits internes issus du coup d’État en 2012. Cela aurait
été le prix du succès d’un DDR.
Moussa DIARRA
Moussa DIARRA
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