#Mali : Administration malienne : Des inégalités à corriger

Malgré l’adoption d’une loi en faveur de la promotion du genre dans notre pays, la problématique de la sous représentativité des femmes dans les instances décisionnelles persiste

Publié vendredi 08 mars 2024 à 09:58 , mis à jour samedi 27 avril 2024 à 11:07
#Mali : Administration malienne : Des inégalités à corriger

De gauche à droite: Niana Aliou Traoré, directrice de la chaîne 2 et Khadiatou Koné, rédactrice en chef de l'ortm 2

Dans notre pays, la Constitution garantit le respect des droits humains, en particulier ceux de la femme. Elle consacre le principe de non-discrimination entre les sexes en son article premier sans oublier la loi n° 2015-052 du 18 décembre 2015. Ces avancées qui sont à saluer constituent plus que jamais, une réelle opportunité pour faire avancer l’égalité entre les sexes et l’autonomisation des femmes dans notre pays. Malgré ces avancées, des efforts restent nécessaires pour corriger certaines inégalités persistantes et consolider les acquis.

Selon le Rapport national volontaire Pays des objectifs de développement durable (ODD 2022), sur les fonctions nominatives et électives des services publics du Mali par exemple, au niveau de l’administration générale, l’on note 5% de femmes préfets, 14,54 % de sous-préfets, 5% (1/20) de gouverneurs et elles représentaient seulement 16,1% dans les fonctions de directeurs de service central, et 14,54% dans les fonctions d’ambassadeurs.

Par ailleurs, avec l’application de la loi N°2015-052 du 18 décembre 2015 instituant des mesures pour promouvoir le genre dans l’accès aux fonctions nominatives et électives, à la suite des élections communales de 2016 et législatives de 2020, les taux de représentation des femmes dans les Conseils communaux et à l’Assemblée nationale sont passés respectivement de 9% en 2009 à 25% en 2016 et de 9,52% en 2013 à 28,57% en 2020.

Le nombre de femmes élues à des postes de représentation n’a progressé que lentement. Elles sont faiblement représentées dans les instances décisionnelles locales, que ce soit en tant que maires ou membres de conseils locaux. Même nommées à des postes au niveau des institutions comme l’administration publique, le taux de représentation des femmes n’atteint globalement pas les 20%. Au-delà de la représentation numérique des femmes, les progrès sont limités, des écarts notoires persistent encore.

Le rythme de la systématisation de la prise en compte de l’égalité de droits femmes, hommes et de l’autonomisation des femmes dans les politiques publiques a jusqu’à présent été faible, tandis que les inégalités entre les genres dans d’autres secteurs primordiaux, notamment l’accès aux ressources, à la protection et la sécurité sociale et la protection contre la violence, sont encore persistantes et omniprésentes. À cela, s’ajoutent les défis d’un financement efficace en faveur de l’égalité des femmes-hommes et de l’autonomisation des femmes dans les politiques publiques.

 

33% DE FEMMES MINISTRES- Il est à noter que dans notre pays, les femmes représentent en moyenne 28,1% du personnel des services publics selon les données recueillies auprès des services techniques de production des statistiques sur le genre. Cette moyenne nationale cache des disparités énormes au niveau de la représentation des femmes dans les fonctions nominatives. Selon les actes de nomination, tant au niveau institutionnel que sectoriel, la plupart des femmes sont nommées par décision avec un taux moyen de 41,3% (Institutions) et 21%, taux suivis par les Arrêtés et les Décrets, faisant comprendre que plus on s’élève dans la hiérarchie, moins elles y sont. Cette situation est perceptible dans les secteurs de la santé, du développement social et de la promotion de la famille et de l’éducation pourtant traditionnellement réputés être des “secteurs féminins”.

Néanmoins, ces secteurs offrent les plus fortes opportunités de nomination des femmes même si la plupart de ces actes sont faits sur la base d’une décision pour respectivement 36,8% et 40,7% contre 34,4% et 26,2% par un arrêté. Aux hautes fonctions nominatives, on note que seulement 16,4% des postes en moyenne sont occupés par les femmes. À l’exception du gouvernement avec 33% de femmes ministres, la haute administration est assez loin du quota requis.

Concernant l’accès des femmes aux fonctions électives, les données recueillies montrent que 19,3% des élus sont des femmes au Mali avec une plus grande proportion au niveau du Conseil national de Transition (CNT) pour 29,7% et du conseil communal pour 24%. Les femmes sont fortement représentées au sein des commissions de travail de ces entités surtout au niveau du Haut conseil des collectivités (HCC) avec 33,3% pour une moyenne de 29,9%.

Au Mali, les femmes représentent 21,7% des élus simples, avec une plus grande part pour le conseil communal, 28,6% contre seulement 4,5% au niveau du Conseil de cercle. Les femmes sont encore moins représentées au niveau des bureaux des différentes entités avec seulement 8,7%. Malgré cette faible représentation, les femmes sont à près d’un tiers (28,6%) dans le bureau du CNT contre aucune dans ceux du Haut conseil des collectivités ou encore du Conseil régional.

Les instances des Collectivités territoriales telles que les Conseils régionaux et les Conseils de cercle sont à la traîne sur la représentation des femmes en leur sein. Toutes régions comprises, il n’y a pas de femme présidente ou vice-présidente des Conseils de région.

Malgré ce tableau peu élogieux, l’espoir est permis. En témoignent les récentes nominations à l’Office de radio et télévision du Mali (ORTM). En effet, elles sont désormais rédactrice en chef de la télévision, directrice de la Chaîne 2, cheffe de section production et programmation, cheffe section information à la chaîne 2. Une première à l’ORTM qui est à saluer. 

 

PRÉPARER LA RELÈVE- Pour son directeur Alassane Diombélé, ces dames qui viennent d’être nommées à ces postes de responsabilité ont le profil requis. Il expliquera que sa gouvernance est basée sur le principe qui est de laisser ses directeurs techniques proposer les chefs de divisions et chefs de sections avec lesquels ils peuvent avoir un résultat. «C’est ainsi qu’après réflexion et au vu des objectifs assignés au nouveau directeur de la radio, nous sommes convenus de mettre à des postes de responsabilité à la Chaîne 2 et à ORTM 2 les dames», souligne le DG de l’ORTM.

 Pour lui,  il était vraiment temps de mettre en avant le potentiel des femmes à l’ORTM. «Elles ont appris à nos côtés et je ne doute pas un seul instant de leur capacité à relever le défi. Et puis, il est important de préparer la relève, donc elles doivent comprendre le fonctionnement administratif de la boîte pour que, dans un futur, elles puissent prendre les rênes de la maison. C’est important», a-t-il conclu. Pour le directeur national de l’aménagement du territoire, Dr Abdoulaye Sanogo, sa structure a plusieurs femmes responsables à la tête des divisions, des sections et aussi au secrétariat.

«Nous comptons poursuivre cette dynamique dans les semaines à venir. Dans notre service, nous mettons en avant les questions de compétences peu importe le genre, il suffit d’avoir le profil et les compétences nécessaires pour accéder à un poste de responsabilité. Nos femmes participent aux activités y compris aux missions de terrain au même titre que les hommes. Nous avons encouragé certaines femmes à renforcer leurs capacités en vue de devenir des cadres supérieurs. Ce qui va permettre d’occuper des postes importants. Trois femmes viennent de boucler leur formation universitaire, et une autre est en formation. Une division sur 4 est dirigée par une femme», a-t-il détaillé.

Selon lui, les femmes doivent être soutenues et encouragées à poursuivre des études supérieures. Plusieurs femmes au niveau de l’administration sont des cadres de catégorie B ou C. «Ce qui ne permet pas de les placer à des postes supérieurs. Souvent, certaines femmes tombent dans le piège en devenant moins disponibles et moins présentes dans les services.

Ce qui démotive les responsables à leur confier des postes stratégiques. Responsabiliser les femmes est très bénéfique pour elles mais aussi pour l’administration. Toutefois, la disponibilité est un facteur très important. Or, elles ne sont pas nombreuses, celles qui peuvent être disponibles. Cela se comprend par la nature des charges familiales et le contexte social au Mali», dit-il.

Dr Sanogo pense que les femmes doivent continuer à se former et à éviter de croire qu’elles sont moins efficaces que les hommes. «En ce 21è siècle, il est temps de comprendre que nous sommes complémentaires et l’épanouissement de la femme est synonyme de l’épanouissement de la famille, voire du pays», explique le directeur national de l’aménagement du territoire. Il soulignera que l’une des missions principales de son service est la réduction des disparités sociales, toute chose qui signifie clairement que chaque citoyen doit être mis dans ses droits sans distinction de sexe pour lui permettre d’améliorer son apport à la société.




Quelques pistes de solutions

 

Les Maliennes sont suffisamment engagées et outillées pour assurer la promotion de la femme. Elles sont présentes sur tous les fronts du développement de notre pays. Plus aucun domaine ne leur échappe.

 Les autorités ont compris en témoigne la création d’un ministère à ce propos. Mieux, des textes ont été adoptés pour promouvoir la représentativité des femmes dans les structures publiques ou aux postes de responsabilités (nominatifs ou électifs).

Toutefois, les efforts doivent se poursuivre pour l’adhésion collective de l’ensemble des citoyens surtout les leaders d’opinions. À cet effet, ces quelques mesures doivent être explorées pour la promotion de la femme dans notre pays.

Il s’agit d’élaborer un programme de partenariat avec les banques et les Institutions de micro finance pour faciliter l’accès des femmes au financement. Il est question d’instituer un fonds Genre au Mali et allouer un budget spécial Genre à tous les départements ministériels pour la sensibilisation non seulement des femmes, mais aussi des hommes sur la problématique genre.

Il est conseillé de revoir le système fiscal pour adoucir sa pression sur les entreprises féminines en vue du renforcement du pouvoir économique des femmes. Il faut conjuguer les efforts (État et partenaires techniques et financiers) pour accompagner le département en charge du genre dans le pilotage et le suivi évaluation de la Politique nationale genre (PNG).

Ce dernier devra à son tour appuyer et conseiller les autres ministères sectoriels dans l’élaboration de leurs programmes respectifs en matière de genre et dans la prise en compte du genre dans leur politique et domaines d’actions.

Des conditions doivent être créées pour identifier la part du budget alloué au genre dans le budget total des départements. Il faut et surtout poursuivre les efforts pour établir l’équilibre entre les hommes et les femmes dans les instances de décision.

Mariam A. TRAORÉ

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