
Amadou Sy Savané, ministre de l’éducation nationale
Celui qui espère sur des statistiques impressionnantes en termes de taux d’alphabétisation de nos compatriotes dans les langues nationales risque d’être un peu déçu par les chiffres. Il ressort des données de la Direction nationale de l’éducation non formelle et des langues nationales (DNENFLN) que ce taux est estimé à environ 30%. Aujourd’hui, avec l’évolution des choses, l’alphabétisation est en train de devenir une exigence surtout que 13 de nos langues nationales sont devenues des langues officielles.
Un constat s’impose. Il est courant de voir nos compatriotes écrire nos langues, notamment le bamanankan avec l’alphabet français ou l’alphabet phonétique international. Les diphtongues du bamanankan «u» et «ɛ» sont remplacées respectivement par les voyelles «u» et «è». La diphtongue du bamanankan «ɛn» par in. Il existe plusieurs exemples de ce type sur les réseaux sociaux, les affiches publiques, mais aussi sur les véhicules de transport en commun, entre autres. Cette situation préoccupe les défenseurs de nos patrimoines linguistiques.
Chaka Keïta est journaliste et auteur d’un recueil de poèmes et d’un autre de contes en bamanankan intitulés respectivement «Jaahe» qui signifie l’étonnement et «Musokɛlɛ», prosaïquement l’accouchement. Il explique que pour le moment, il n’y a aucun décret qui oblige l’adoption intégrale d’un système d’écriture de nos langues. Ce qui fait que les gens écrivent la même chose de plusieurs manières, déplore-t-il. Et de dire qu’il est temps que les autorités compétentes décident de normaliser ces écritures.
L’auteur de «Jaahe» révèle aussi qu’il ne faut pas que nos langues se limitent au stade littéraire. C’est-à-dire des romans, de la poésie et du conte. Il estime simplement qu’il faut les utiliser aussi dans le domaine de la recherche scientifique afin qu’elles enregistrent des avancées significatives’ y compris dans les activités socioprofessionnelles.
Chaka Keïta avoue que des efforts sont en train d'être accomplis pour alphabétiser au niveau du primaire, secondaire voire universitaire. Selon le journaliste-écrivain, après l’alphabétisation, il faut que l’apprentissage de nos langues aboutisse à des opportunités diverses. Pour lui, le système d'alphabétisation instauré depuis longtemps est une manière faite à la base pour que le français soit bien maîtrisé dans nos pays.
Et de rappeler que les projets d'alphabétisation au Mali ont toujours été financés et le premier objectif n'a jamais été de mieux comprendre nos langues. Il propose de mettre en œuvre une autre politique qui permettra de mieux connaître nos langues, cultures et aspirations pour les années à venir. Cela pour le développement de nos sociétés. «Tant que cela n'est pas fait, on tournera en rond et la finalité sera toujours la langue française», prévient Chaka Keïta.
OUTIL DE DÉVELOPPEMENT- Quant à Salif Sora, membre de l’Association «Mali faso kanw layiriwalitɔn (Mafala)», il souligne que les membres de son association œuvrent pour le développement des langues nationales à travers la sensibilisation, la formation et la traduction. Il martèle que l’implication de la population dans la promotion des langues maternelles relève de la volonté de l’État.
Si les autorités compétentes décident aujourd’hui que tous les services écrivent dans les langues nationales, déclare-t-il, les gens s’y conformeront rapidement après quelques mois de formation. Cet interlocuteur pense que le système éducatif devrait mettre à la disposition des enfants des syllabaires pour leur faciliter la maitrise de nos langues depuis le primaire. Ce qui, selon lui, permettra aux apprenants d’accéder aux connaissances sans grande difficulté. Il persiste et signe que nos langues sont des outils efficaces de communication et d’information. Ce qui peut permettre d’aplanir souvent les interprétations dans lesquelles, on est souvent trahi.
À en croire les responsables de la Direction nationale de l’éducation non formelle et des langues nationales (DNENFLN), le taux d’alphabétisation dans nos langues est estimé à environ 30%. Une statistique loin d’être satisfaisante. Outre, l’Académie malienne des langues (Amalan) est une structure de recherche créée par l’État dans le but de préserver les langues maternelles. Elle couvre les treize unités linguistiques du Mali à savoir le Bamanankan, le Bomu, le Bozo, le Dɔgɔsɔ, le Fulfulde, le Mamara, le Xaasongaxanŋo (Khassonké), le Sɔngoy, le Soninke, le Syɛnara, le Maninkakan, le Tamasheq, le Hasanya (Maure).
Le chef d’unité Bamanankan, Yacouba Sanogo est attaché de recherche à l’Amalan. Il explique que son établissement procède à la description scientifique et systématique des langues nationales attestées dans les différentes aires sociolinguistiques du pays en vue de leur instrumentation. Il explique que l’instrumentation consiste à offrir à chaque langue, un alphabet des règles de transcription et des documents de référence linguistique. Dans le même sens, poursuit le chercheur, l’Amalan s’active à créer un environnement lettré au niveau de chaque communauté linguistique.
En tant que structure technique, elle initie les textes législatifs et réglementaires en vue d’offrir un statut aux langues nationales, fait savoir l’agent de l’Amalan. Selon lui, on doit faire en sorte que les langues nationales deviennent des outils de développement socio-économique du Mali. Elles sont les véhicules de la culture et du développement endogène durable.
Pour éviter de voir les orthographes erronées sur les véhicules, les plaques publicitaires, le chef d’unité bamanankan préconise une forte campagne de sensibilisation dont l’objectif sera d’orienter les usagers vers l’Amalan en vue de la traduction des textes à mettre sur ces panneaux ou les véhicules.
Au-delà des efforts qui sont en train d’être faits par cette académie, il y a quelques contraintes. Yacouba Sanogo évoque l’insuffisance de ressources financières et de moyens logistiques pour mener à bien ses missions de terrain. Il entrevoit un peu d’espoir avec les initiatives et les actions de valorisation de ces langues.
Les autorités de la Transition ont entrepris un vaste chantier visant à refonder notre système éducatif. Les États généraux de l’éducation (EGE), tenus en janvier 2024, et la décision de déclarer 13 de nos langues nationales comme des langues officielles sont des actions fortes s’inscrivant dans cette dynamique. Parmi les recommandations des EGE, la valorisation des langues nationales occupe une place importante. Il ne reste plus qu’à espérer que cette volonté de valoriser nos langues aboutisse à un véritable essor.
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Langues nationales : Atouts de développement
Réunis, le jeudi 24 avril, pour la première séance plénière de la session ordinaire d’avril 2025, les membres du Conseil national de Transition (CNT) ont examiné cinq textes dont le projet portant de loi organique déterminant les conditions et les modalités d’emploi des langues officielles du Mali. Après avoir été défendue par le ministre de l’Éducation nationale, Amadou Sy Savané devant les conseillers, le CNT a adopté la loi organique déterminant les conditions et les modalités d’emploi des langues officielles de notre pays.
Aussi, les membres du Conseil ont adopté un amendement supprimant un texte de l’article 31 de la Constitution du 22 juillet 2023 qui limitait les langues nationales officielles du Mali à 13 langues. Ils ont adopté un texte qui laisse la porte ouverte à d’autres langues pouvant instrumenter et augmenter les langues offucielles. En quoi l’augmentation des 13 langues pourrait contribuer au développement envisagé par le peuple ? Y a t-il d’obstacle à la valorisation de nos langues ?
De l’avis du président de «Mali fasokanw layiriwalitɔn (Ma.fa.la)», de Salif Sora, ce n’est pas une bonne idée d’augmenter encore les 13 langues nationales déclarées officielles. Il estime que ce nombre est largement suffisant. «Même s’ils peuvent officialiser encore plus, ils doivent quand même reconnaître une seule comme principale et langue de travail. Mais à cette allure, toutes les langues ne peuvent pas être mises au même pied, sinon cela serait encore un recul pour nous, parce qu’on ne peut pas communiquer dans toutes les langues», explique ce militant de la promotion des langues nationales.
Et d’estimer que tous les pays développés choisissent une langue parmi tant d’autres comme celle de travail et de communication. Selon lui, il faut se débarrasser de la mentalité selon laquelle, le choix d’une langue parmi les autres comme officielle et de travail offusquera les autres communautés. C’est une appréhension injustifiée.
Dr Mahamadou Konta a occupé plusieurs postes à l’Académie malienne des langues (Amalan). Il fut chef de l’unité Bamanankan, celui de section outils de références linguistiques et chef de département programmes d’études et de recherche linguistiques appliquées. Fort de ce vécu, il ne voit pas d’obstacle à la promotion de nos langues. Selon lui, aucune voix ne s’est levée pour protester contre quoique ce soit depuis leur officialisation.
Le chercheur déclare que les textes sont clairs de 1960 à nos jours pour valoriser les langues nationales.
«D’abord l’esprit de la première Constitution dit que : dès que les conditions sont réunies et que les langues sont prêtes, il faut travailler avec elles officiellement. Depuis ce jour, nous sommes dans cet esprit qui a évolué jusqu’à leur officialisation aujourd’hui», rappelle-t-il. Et de dire que l’amendement qui a été adopté par le CNT, supprimant le texte qui limite à13 langues, n’abroge point la loi organique déterminant les conditions et les modalités d’emploi des langues officielles.
SOCLE- Dr Mahamadou Konta dira que de l’indépendance à aujourd’hui, des efforts ont été consentis pour valoriser nos langues, surtout en matière d’éducation. Il s’est avéré dans les années 1960 que pour alphabétiser le maximum d’adultes dans un temps record, il fallait faire recours aux langues maternelles. Le slogan de l’époque était «apprendre à lire et à écrire». À partir de 1968, le Centre national d’alphabétisation fonctionnelle (CNAF) a été portée sur les fonts baptismaux. Pendant cette période, en plus des adultes ruraux, l’alphabétisation fonctionnelle s’étendait aux ouvriers de certaines unités industrielles.
Tous ces efforts ont été déployés pour bâtir le socle d’un développement fort. «Peut-on nous reprocher de baisser les bras face à l'ignorance et le sous-développement ? Non. Il y a eu sûrement des insuffisances, des erreurs voire des fautes graves. Mais depuis les premières années de l’accession à la souveraineté nationale, le Mali s’inscrit dans l'amélioration des activités productives et la formation citoyenne par l'alphabétisation», a expliqué cet interlocuteur.
L'introduction des langues nationales devrait nous amener à être surs de nous-mêmes et enclins à prendre des initiatives pour s'émanciper. Selon le chercheur, il n'y a pas d'autres alternatives que de réussir absolument cette mission. Et de confier que le succès de la Compagnie malienne pour le développement du textile (CMDT) est dû en grande partie à la réussite des campagnes d'alphabétisation dans les zones cotonnières au Mali.
N'Famoro KEITA
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