Dans
le monde tourbillonnant, il existe des âmes qui tracent leur chemin dans un
silence inouï, portant en elles une force insoupçonnée. Assitan Diakité, née
avec une malformation fait bien partie de ces âmes. Détermination et motivation
sont deux épithètes qui siéent comme un gant à cette adolescente sur qui, le
sort s’est acharné.
Aucune
âme sensible n’est indifférente au sort de cette élève de 5è année, clouée dans
une chaise roulante. Qu’il pleuve ou qu’il neige, elle prend le chemin de
l’école, accompagnée de son petit frère, Mamadou Lamine, qui pousse le fauteuil
roulant de toutes ses forces. Selon des témoignages, son petit frère décuple
cet effort depuis des mois et des mois afin que sa sœur jouisse de son droit à
la scolarisation comme tout autre enfant. «Je fréquente le groupe central»,
indique la fillette, l’air timide lorsqu’on l’aborde. Elle affiche un sourire
innocent qui force l’admiration et prouve sa résilience à toute épreuve.
Son
petit frère s’invite à la conversation et ajoute : «Nous fréquentons tous
deux cette école. Je suis chargé de l’amener chaque jour», Précisant que c’est
lui qui s’occupe d’elle à l’école. «Je l’amène jusque dans la classe. À la
recréation, je pars la chercher et nous faisons nos achats ensemble. À la
descente, je me charge de la ramener à la maison», explique ce petit ange à qui
la vie a vite confié une lourde et noble tâche.
Assitan
Diakité a été d’abord inscrite à l’école coranique à Koutiala, avant que sa
famille ne s’installe à Ségou où elle sera scolarisée en octobre 2019 à 9 ans
par son père au Groupe scolaire Bandiougou Bouaré «groupe
central d’alors», mais à sa demande. Vu son handicap, on l’accepte. Les
autres élèves posaient sur elle un regard inquisiteur, mais à force de
sensibilisation tous finissent par l’accepter, explique en substance le
directeur de son établissement scolaire, Bouba Traoré, qui la trouve «très
motivée».
Son maitre d’école, Amidou Koné, confesse volontiers qu’Assitan écrit très bien. Je l’encourage à parler. Elle n’est pas aussi brillante que ça, mais avec un peu d’appui, d’encadrement, son niveau pourra s’améliorer, dit le pédagogue. À l’école, Assitan Diakité est entourée de toute l’attention requise au point d’être, appelée «la femme du directeur» parce que celui-ci est constamment à ses petits soins.
VICTIME
DE STIGMATISATION- Assitan est née à Ségou en 2010. Troisième d’une fratrie de
cinq enfants, elle est la seule à être en situation de handicap. «Elle est née
comme ça. On ignore sa maladie. À Koutiala, les médecins ont diagnostiqué une
bosse qu’ils ne pouvaient prendre en charge, selon eux, par manque de plateau
technique adéquat. À Ségou, on a tout tenté médicalement sans obtenir de
résultat satisfaisant. Sa mère Awa Coulibaly explique avoir eu recours à
d’autres croyances pour conjurer le mauvais sort de sa fille. Elle a investi
son temps, son énergie et son argent sans trouver la solution. Selon
elle, sa fille continue de se plaindre régulièrement de douleur au niveau de la
poitrine. Visiblement, la bosse qu’elle traîne la gêne. Aussi elle a des
fractures au niveau de certaines parties du corps qui sont prises en charge par
un traumatologue traditionnel.
Tout comme les autres enfants en situation de handicap, Assitan est souvent victime de stigmatisation. «Quand tu as un enfant malade, les autres enfants lui rappellent son handicap en l’indexant par ce nom. Même certains adultes de passage la regardent au point de lui faire sentir son handicap. Ce n’est pas facile. Mais en tant que mère, mon rôle, c’est de l’accompagner. C’est une obligation pour moi de le faire», dit-elle les larmes aux yeux, déterminée à trouver une solution pour soulager sa fille. Elle pense souvent recourir à un guérisseur qui ferait des prouesses pour la prise de tel handicap. Une fois qu’elle aura eu les moyens nécessaires.
Si
tous les fils du Mali ont droit à une éducation, force est de constater que les
enfants handicapés comme Assitan, ne profitent pas pleinement de ce droit, du
manque d’écoles spécialisées.Pour
alléger sa souffrance et celle de sa famille, elle a besoin d’être assistée par
les autorités. «Sa chaise roulante, un don qu’elle a reçu à Koutiala, il y a
plusieurs années est en mauvais état et ne lui facilite point son déplacement à
l’école. Elle y tombe très souvent et fracture ses os qui ne sont pas très
solides. Son directeur lui avait trouvé une autre chaise roulante qui
malheureusement n’est pas adaptée à sa situation», confirme sa maman.
En plus de cela, les douleurs dont la petite se plaint fréquemment au niveau de la poitrine ont besoin d’être prises en charge par un spécialiste en la matière. Le cas Assitan interpelle les acteurs qui interviennent dans le domaine de la protection de l’enfance. Vivement donc un soutien à l’adolescente parce qu’aucun ne doit être laissé pour compte.
Aminata Dindi SISSOKO / AMAP - Ségou
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