#Mali : Dr Boubacar Bocoum sur les nouveaux Code pénal et Code de procédure pénale : «Ces réformes visent à restaurer la confiance des citoyens dans le système judiciaire»

Le professeur de Droit pénal à l’Université des sciences juridiques et politiques de Bamako (USJPB) et à l’École de maintien de paix Alioune Blondin Bèye nous livre ses impressions sur l’adoption, jeudi dernier, par le Conseil national de Transition (CNT), du nouveau Code pénal et du nouveau Code de procédure pénale. Dr Boubacar Bocoum, également secrétaire général adjoint de l’Association malienne de Droit pénal (AMADP), aborde les changements majeurs intervenus dans l’arsenal judiciaire

Publié lundi 04 novembre 2024 à 22:11
#Mali : Dr Boubacar Bocoum sur les nouveaux Code pénal et Code de procédure pénale : «Ces réformes visent à restaurer la confiance des citoyens dans le système judiciaire»

 

L’Essor : Que vous inspirent le nouveau Code pénal et le nouveau Code de procédure pénale ?   

Boubacar Bocoum : L’adoption du nouveau Code pénal et du nouveau Code de procédure pénale marque le début d’une nouvelle ère pour la justice au Mali. Plus de 60 ans après l’adoption du Code pénal et du Code de procédure pénale, le dispositif pénal se devait d’opérer sa mue. Il fallait véritablement aller au fond des choses. Pour l’heure, les deux textes sont à la hauteur de la démarche entreprise pour leur adoption.

Ces réformes ambitieuses sont  le fruit d’un processus participatif et inclusif. Elles visent à notre avis à répondre aux défis contemporains et à restaurer la confiance des citoyens dans le système judiciaire. C’est une étape décisive pour garantir la paix sociale, la stabilité et la bonne gouvernance dans notre pays.

L’adoption de ces deux textes est significative. Ces réformes sont essentielles pour adapter le système judiciaire malien aux défis actuels et aux aspirations de la population. C’est une évolution majeure de paradigme dans la garantie des droits fondamentaux des citoyens. Les garanties procédurales sont indéniablement renforcées, à condition d’en faire une réelle promotion.

L’Essor : L’adoption de ces deux textes apporte-t-elle des avancées dans le système judiciaire malien ?

Boubacar Bocoum : L’adoption de ces nouveaux codes constitue une avancée majeure pour le Mali. Elle témoigne de la volonté des autorités de mettre en place un système judiciaire plus efficace et plus juste. Cependant, le succès de ces réformes dépendra de l’effectivité des textes adoptés et la mobilisation de tous les acteurs concernés : pouvoirs publics, acteurs de la justice, société civile.

De ces deux lois, l’on peut retenir quelques avancées majeures. Si on ne s’attache qu’à l’aspect Droits de l’homme et respect des garanties procédurales. On peut noter l’institution d’un collège des libertés et des détentions : c’est une innovation majeure qui participera au renforcement de la protection de la présomption d’innocence et au désengorgement des maisons d’arrêt. Il s’agit là  d’une mesure visant à banaliser moins le décernement des mandats de dépôt.

Il convient de retenir également l’institution du juge de l’application des peines. Une mesure permettant de renforcer la fonction de réinsertion sociale de la peine, en modulant les peines en fonction du comportement des personnes détenues. Une autre innovation, c’est l’instauration de mesures relatives à la protection du dénonciateur des experts et des témoins. Enfin, le recours à un mode alternatif à l’emprisonnement tel que le bracelet électronique, pourrait être une meilleure solution au problème de surpopulation carcérale. 

L’Essor : En quoi les contenus de ces nouveaux codes sont en phase avec nos us et coutumes ?

Boubacar Bocoum : Les nouvelles dispositions des textes adoptés le jeudi 31 octobre 2024 ont pour objectif de fournir un cadre juridique renouvelé, mais adapté aux réalités maliennes. C’est dans cet ordre d’idée que la législation pénalise désormais l’homosexualité, incluant sa pratique, sa promotion et sa défense. Aucune sanction pénale n’était en vigueur jusqu’à présent dans notre pays en grande partie musulman et où les valeurs traditionnelles restent fortes.

Enfin, le législateur accepte de changer de paradigme comme nous le proposions lors des rencontres scientifiques organisées à l’Université. Les législateurs maliens de 1961 et 2001 s’étaient contentés de reconduire presque intégralement des textes coloniaux adoptés sous le règne du Monarque français, Napoléon Bonaparte, notamment le Code d’instruction criminelle de 1807 et le Code pénal de 1810.

«Depuis plus de 60 ans, ce sont ces textes qui régissent le Droit pénal et la procédure pénale au Mali. Une loi étant le reflet des aspirations d’une société donnée à un moment donné, il importe de relever qu’après plus d’un demi-siècle de mise en œuvre, nos codes sont devenus archaïques et rétrogrades».

C’est la raison pour laquelle, au-delà d’une énième réécriture de certains articles du code pénal et du code de procédure pénale, nous avons estimé qu’il fallait choisir des tendances endogènes pour une véritable refondation de la politique judiciaire.

L’Essor : Qu’est-ce qu’on peut retenir aujourd’hui comme changements majeurs dans le système judiciaire malien?

Boubacar Bocoum : Les innovations se trouvant dans ce texte comportent, entre autres, l’harmonisation avec les dispositions de la nouvelle Constitution, l’agrégation des textes pénaux épars dans un seul et unique document, le renvoi à la Constitution pour la sanction de la haute trahison, la prise en compte de nouvelles infractions telles que la traite des personnes, l’esclavage, le trafic illicite de migrants, les infractions prévues par les actes uniformes de l’Organisation pour l’harmonisation du droit des affaires en Afrique (Ohada) et de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa). S’y ajoutent l’incrimination de l’apologie du terrorisme et le recrutement des terroristes. Mais aussi, l’introduction du principe de la responsabilité pénale des personnes morales à l’exclusion de l’État et des Collectivités territoriales. Comme par exemple, les banques et assurances, les associations, mouvements et partis politiques, les Organisations non gouvernementales (ONG).

Autres nouveautés qu’on peut retenir, le renforcement des principes directeurs du procès pénal, l’institution du référé liberté qui permet de demander la remise en liberté à tout moment et à toute étape de la procédure, la suppression des cours d’assises au profit des chambres criminelles au niveau des tribunaux de grande instance pour ne pas confiner les audiences dans une périodicité.

Cela permettra d’assurer la bonne distribution de la justice et le désengorgement des maisons d’arrêt. Il est à signaler aussi l’instauration au niveau de chaque Cour d’appel d’une chambre des appels criminels pour connaître de l’appel interjeté contre les décisions des champs criminels des tribunaux de grande instance.

Interview réalisée par

Namory KOUYATE

Lire aussi : Commémoration de l'an II de la reprise de Kidal: Le CDM lance la révolution progressiste populaire malienne

Dans le cadre de la commémoration du deuxième anniversaire de la reprise de Kidal par les Forces armées maliennes (FAMa), le Collectif pour la défense des militaires (CDM) a tenu un grand meeting, ce vendredi 14 novembre au stade Mamadou Konaté à N’Tomikoribougou, en Commune III du District .

Lire aussi : Mali: La CDTM s'engage à renforcer ses structures

Les militants de la Centrale démocratique des travailleurs du Mali (CDTM) sont réunis depuis ce vendredi 14 novembre 2025 au Mémorial Modibo Keïta dans le cadre des travaux du 2è Congrès ordinaire de cette centrale syndicale..

Lire aussi : BNDA : Un geste pour faire battre le cœur des enfants souffrant de malformations cardiaques

La Banque nationale de développement agricole (BNDA) vient de remettre un chèque de 15 millions de Fcfa à l’hôpital mère-enfant, «Le Luxembourg», pour la prise en charge des enfants souffrant de malformations cardiaques. Cette somme est destinée à la prise en charge chirurgicale de 5 enf.

Lire aussi : Forum des médias du Sud global à Johannesburg : Xinhua et l’Union africaine ouvrent le débat sur la gouvernance mondiale

L’événement a réuni 200 participants représentant 161 organisations de médias, d’entreprises, de think tanks et de centres d’études stratégiques, venus de 41 pays africains et de Chine.

Lire aussi : Cercle de Takalote : Le Gouverneur de la Région de Kidal en visite à Koniba

Le Général de division Elhadji Gamou, gouverneur de la Région de Kidal, a effectué, le vendredi 7 novembre 2025, une visite de terrain à Koniba, dans le Cercle de Takalote. Cette visite s’inscrit dans le cadre du renforcement du dialogue avec les populations et du suivi des actions de dévelo.

Lire aussi : Général El Hadj Gamou : Pilier de l’unité et de la stabilité à Kidal

Dans un ouvrage de 65 pages, publié en octobre 2025 et dédié au Général Elhadji Gamou, gouverneur de Kidal depuis novembre 2023, Dr Ahmadou Touré, docteur en sciences politiques et expert en gouvernance, médiation et sécurité, met en lumière l’unité nationale, la stabilité, la réconci.

Les articles de l'auteur

Général Elhadj Gamou sur la situation à Kidal : «Nous sommes dans les activités de développement»

Dans le cadre de la célébration du 2è anniversaire de la prise de Kidal (14 novembre 2023) par les Forces armées maliennes (FAMa), le gouverneur de la région, le Général de division Elhadj Gamou, nous a accordé un entretien téléphonique au cours duquel il a noté des avancées significatives dans plusieurs domaines..

Par Namory KOUYATE


Publié vendredi 14 novembre 2025 à 11:33

Autorités et légitimités traditionnelles : Des acteurs incontournables dans l’éducation et la construction du Maliden kura

La journée qui leur est dédiée, a été marquée hier par des conférences-débats, des jeux-concours, des expositions photos et des consultations médicales ophtalmologiques et en géronto-gériatrie à Bamako et à l’intérieur du pays.

Par Namory KOUYATE


Publié mercredi 12 novembre 2025 à 09:39

Spéculation sur les produits pétroliers : Un terreau favorable pour les criminels

Qu’est-ce que la spéculation ? Comment cette pratique est-t-elle traitée par la législation en vigueur ? Comment est protégé le consommateur face à ce genre de situation ? Quelles sont les actions entreprises par le gouvernement dans ce sens ? Voilà autant de questions auxquelles Dr Boubacar Bocoum,.

Par Namory KOUYATE


Publié mardi 11 novembre 2025 à 08:32

Koulouba : Le nouveau bureau du CNJ présenté au chef de l’Etat

Composé de 33 membres, le bureau national du Conseil national de la jeunesse (CNJ) est dirigé par Sory Ibrahim Cissé pour un mandat de trois ans. L’organisation est représentée dans les 815 communes, les 19 régions et le District de Bamako.

Par Namory KOUYATE


Publié vendredi 17 octobre 2025 à 12:28

Décès de l’ex-Premier ministre Soumana Sako : Le Mali perd un homme d’État franc et intègre

Né en 1950 à Nyamina (Région de Koulikoro), l’ancien Premier ministre Soumana Sako est décédé le 15 octobre 2025 à Bamako des suites d’une maladie. Homme d’État, les Maliens se souviennent de sa démission avec fracas de son poste de ministre des Finances sous le régime du Général Moussa Traoré en 1987..

Par Namory KOUYATE


Publié jeudi 16 octobre 2025 à 13:48

Pr Franklin Nyamsi : «On en veut au Mali pour avoir délogé des troupes néocolonialistes occidentales et onusiennes»

Dans cet entretien, le président de l’Institut de l’Afrique des libertés apporte son éclairage sur les stratégies de guerre informationnelle et le «terro-journalisme». Pr Franklin Nyamsi évoque aussi les décisions courageuses prises par les autorités maliennes.

Par Namory KOUYATE


Publié mardi 14 octobre 2025 à 08:13

Cercle de Kignan : La CACK portée sur les fonts baptismaux

Le samedi 27 septembre 2025 fera date dans les annales du tout nouveau Cercle de Kignan, dans la Région de Sikasso. Un nouveau bébé est né. Il s'agit de la Coordination des associations du Cercle de Kignan, en abrégé (CACK) qui a vu le jour au Palais de la culture Amadou Hampaté Bâ..

Par Namory KOUYATE


Publié vendredi 10 octobre 2025 à 11:54

L’espace des contributions est réservé aux abonnés.
Abonnez-vous pour accéder à cet espace d’échange et contribuer à la discussion.
S’abonner