Sanctions imposées au Mali : La guerre financière de la BCEAO

En privant illégalement notre pays de ses avoirs, elle viole ses textes, fragilise le développement du marché financier régional et le décrédibilise auprès des investisseurs régionaux et internationaux.

Publié jeudi 03 février 2022 à 08:00
Sanctions imposées au Mali : La guerre financière de la BCEAO

Nos autorités assurent que les échéances non réglées seront immédiatement payées dès la levée des restrictions.

La Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) n’est-elle pas en train de prendre des positions risquées tendant à décrédibiliser notre zone monétaire et par ricochet le jeune marché financier ouest-africain ? En entérinant les sanctions prises le 9 janvier à l’encontre du Mali par la Conférence des chefs d’États et de gouvernement de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) réunie à Accra (Ghana), elle viole ses propres textes, envoyant ainsi un signal négatif aux investisseurs quant à sa viabilité : que vaut une Banque centrale aux ordres systématiques des politiques ?        


Deux sommets extraordinaires de la Cedeao et de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa) se sont tenus le 9 janvier 2022 à Accra. Suite à leurs conclusions invitant à imposer des sanctions économiques, financières, commerciales à notre pays, la BCEAO a pris des mesures à l’encontre de l’État du Mali. Il s’agit du gel des avoirs de l’État malien et des entreprises publiques et parapubliques à la BCEAO, et du blocage de tous les transferts de l’État malien passant par les systèmes de paiement de la Banque centrale.


Ces mesures jugées «illégales» et «humaines», violent gravement les dispositions pertinentes de l’article 4 des statuts de la BCEAO. Il stipule que : «Dans l’exercice des pouvoirs et dans l’accomplissement des missions qui leur sont conférés par le Traité de l’Umoa et par les présents Statuts, la Banque centrale, ses organes, un membre quelconque de ses organes ou de son personnel ne peuvent solliciter, ni recevoir des directives ou des instructions des institutions ou organes communautaires, des gouvernements des États membres de l’Umoa, de tout autre organisme ou de toute autre personne…».


En dépit de l’existence de ce garde-fou pour empêcher toute intrusion des politiques, les autorités monétaires ouest-africaines ont refusé d’honorer l’engagement de l’État du Mali vis-à-vis de ses créanciers. «À cause de ces restrictions et malgré des avoirs suffisants du Trésor public du Mali dans ses livres, la Banque centrale n’a pas procédé au règlement de l’échéance du 28/01/2022 au titre du paiement du coupon sur les Obligations assimilables du Trésor référencées ML0000001577 et ML0000001585 pour un montant total de 2.699.664.000 Fcfa», déplore un communiqué du ministre de l’Économie et des Finances, publié le mardi 1er février.

Le même jour, une note de l’Umoa-Titre informait les investisseurs qu’il a «été constaté le non-paiement des sommes dues ce 31/01/2022 par l'État du Mali au titre du paiement du capital et des intérêts sur l'Obligation assimilable du Trésor référencée (code ISIN) 10000001080 pour un montant de 2,7 milliards Fcfa». L'agence chargée du Marché des titres publics de la zone Uemoa (MTP) précise que cette situation est consécutive aux sanctions précitées. Cette manière de faire est contraire aux réglementations en vigueur en la matière.

«Cette pratique de la BCEAO constitue une violation de l’article 11 du Règlement N°06/2013-CM-Uemoa sur les bons et obligations du Trésor émis par voie d’adjudication ou de syndication avec le concours de l’Agence Umoa-Titres», dénonce le ministre Alousséni Sanou.

Toutefois, rassure le patron de l’hôtel des Finances, «l’État du Mali, qui a toujours honoré ses engagements sur le marché financier, tient à rassurer les investisseurs de sa volonté et de sa capacité à faire face à ses engagements». L’Umoa-Titre abonde assurant veiller «au traitement optimal des échéances de dettes contractées par l'État du Mali sur le MTP et ce, en collaboration avec les institutions concernées».


Une assurance certes nécessaire mais qui lève un pan du voile sur les malaises des responsables du marché financier sous-régional que crée cette situation. Tout en se disant «demeurés mobilisés et attentifs» à la situation des investisseurs du Marché des titres publics, ils réaffirmons leur détermination à prendre dans le cadre de leur mission, toutes les initiatives pour garantir un fonctionnement optimal du marché des titres public».


Car, il est clair que face à de tels incidents dans une sous-région instable au plan politique et sécuritaire, les investisseurs pourront être tentés de réfléchir à deux fois avant d’investir leur argent. «Au-delà, cette pratique fragilise le développement de notre marché financier régional et le décrédibilise auprès des investisseurs régionaux et internationaux», conseille le ministre malien de l’Économie, réitérant que «les échéances non réglées seront immédiatement payées dès la levée des restrictions».


Restrictions qui pourraient être levées progressivement dès aujourd’hui à Accra. Un sommet se tiendra dans la capitale ghanéenne sur la situation au Burkina, en Guinée et au Mali. Sur la question, les parties africaines ont opté pour des solutions consensuelles en définissant ensemble un chronogramme «consensuel et raisonnable». Cette flexion est nécessaire s’il l’organisation sous régionale veut préserver sa crédibilité écorchée auprès des peuples Cedeao et africains à cause des sanctions «illégales et humaines» imposées au Mali.


Au-delà de la fiabilité et de la viabilité de notre marché financier, ces pratiques étalent au grand jour «la question monétaire» qui «est un sujet plus urticant que la question militaire». Il est plus facile à la France de rapatrier ses forces du Mali et même du Sahel que de se délester de son pouvoir monétaire, analyse un diplomate occidental.

Un observateur de la scène politique malienne et africaine s’interroge : «Les récents événements dans la zone Cedeao, soutenus et entretenus, ne sont-ils pas un prétexte suffisant pour détourner l’attention des Africains et leur faire oublier l’Eco, cette monnaie sous régionale qui devrait remplacer le Fcfa ? Le projet monétaire n’est-il pas ainsi renvoyé aux calendes grecques ?».


Le seul combat qui vaille pour nos États, c’est la création d’une monnaie au régime de change flexible et qui rompt tous les liens avec le Trésor français. En attendant, le Fcfa est toujours «un mort en sursis».

Cheick Moctar TRAORE

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