L’Essor : Le gouvernement s’est engagé à
refonder le Mali. Quel va être le rôle de votre département ?
Andogoly Guindo : Notre pays traverse une
crise sans précédent qui a ébranlé les fondements de notre nation. Pour sortir
définitivement de cette grave crise, le président de la Transition a engagé le
gouvernement dans un vaste chantier de refondation nationale axé sur la
restauration de nos valeurs culturelles.
Face à la crise identitaire et sociale, une réponse urgente et appropriée
s’avère nécessaire afin d’éviter un effondrement total de notre société, voire
de la nation malienne.
C’est dans cette perspective que suivant les
instructions éclairées du chef de l’État, mon département a décidé de susciter
la réflexion en vue de proposer des solutions idoines s’appuyant sur les vertus
et les valeurs qui ont toujours caractérisé notre société. Celles-ci seront
consignées dans un ouvrage scientifique de référence intitulé «Charte d’éthique
et des valeurs du Mali».
Cette Charte sera un document référentiel
inspiré des principes, des us et coutumes ancrés dans les valeurs ancestrales
et dans la civilisation universelle. La culture constitue en effet le socle de
toute refondation solide et durable. Elle se nourrira également de nos expériences
pratiques, de nos proverbes et de nos adages qui sont la quintessence de notre
mémoire collective, le fruit de l’expérience pratique de nos ancêtres au cours
des siècles et qui contiennent le meilleur de notre héritage spirituel.
La vision de mon département, à travers cette
Charte, est de faire de la culture le socle de la refondation pour l’émergence
d’un nouveau type de citoyen pétri des valeurs du Maaya et du Danbé, citoyen du
«Mali kura».
Donc, notre rôle sur le chantier de la
refondation sera celui de la promotion du patrimoine culturel et de nos valeurs
sociétales supérieures, d’éducation, de conscientisation à travers la culture
en vue d’un changement positif des comportements. Il s’agit de faire de
l’endoctrinement pour un patriotisme actif, conformément à la vision du président
de la Transition. Il s’agira pour notre ministère d’œuvrer en sorte que le Mali
kura issu de la refondation puise en partie sa sève dans ces valeurs
ancestrales. Il s’agira enfin pour nous d’œuvrer à restaurer au Mali son statut
de «pays des hommes d’honneur».
L’Essor : Le Mali nouveau auquel nos
compatriotes aspirent repose sur le socle de la culture et de nos valeurs sociétales.
Quelle sera la stratégie de votre département pour ce Mali kura avec les
citoyens pétris de ces valeurs ?
Andogoly Guindo : Il est évident que le
Malikura ne se fera qu’en puisant sa substance dans les valeurs du passé, le
Mali de nos ancêtres, donc un peu de Malikɔrɔ aussi.
Comme le rappelle très souvent le président de
la Transition, le colonel Assimi Goïta :«il ne peut y avoir de développement
harmonieux et durable sans la prise en compte des valeurs culturelles
fondatrices de notre société». Le Mali ne renaîtra de ses cendres que lorsque
les Maliens retourneront aux sources, aux valeurs ancestrales comme le Maaya,
et le danbé.
Face à la dégradation progressive de nos mœurs,
seule une réponse culturelle nous aidera à juguler des fléaux comme la
corruption, la roublardise, la perte d’autorité parentale, l’affaissement de
l’autorité de l’état, la mauvaise gouvernance, etc.
En plus de l’élaboration et de la mise en œuvre
du projet de la Charte d’éthique et des valeurs du Mali, mon département s’évertuera
à exécuter des programmes de protection et de promotion du patrimoine culturel,
d’éducation à la culture à travers des créations artistiques, des productions
cinématographiques, le tourisme domestique pour un affermissement de la conscience
citoyenne.
La finalité de cette stratégie est de parvenir à construire un
nouveau type de citoyens maliens ayant une conscience aigüe du patriotisme et
cultivant les vertus d’honneur, de bravoure, d’intégrité et de courage. Le Mali
nouveau, le Mali de nos aspirations, ne peut se bâtir que sur le socle de nos
valeurs sociétales, supérieures léguées par nos ancêtres. Ces valeurs
constituent en même temps le ciment et le ferment de notre nation. Le Mali kura
s’accompagnera du «Maliden kura».
L’Essor : Vous envisagez de créer un organe
autonome qui va fédérer tous les secteurs de la culture. Comment va s’appeler
cet organe et quelles sont ses missions ?
Andogoly Guindo : La création d’un
organisme national de représentation du monde de la culture est une préoccupation
constante chez les acteurs du domaine qui, depuis des années déjà, sollicitent
vivement la mise en place d’une telle entité. Mon département est en pleine réflexion
sur l’élaboration des textes d’un Conseil national des arts et de la culture
(CNAC) dont l’adoption prendra en charge cette préoccupation.
Le CNAC se voudra un organisme à caractère
professionnel qui jouera un rôle d’interface entre les pouvoirs publics et les
acteurs des domaines des arts et de la culture, étant donné son caractère représentatif
et fédérateur. Sa mission est de fédérer toutes les organisations
d’artistes, d’acteurs et d’entrepreneurs culturels, des Niamakalas et assimilés.
L’Essor : Quelles sont les grandes actions que
votre département a réalisées depuis le début de la Transition ?
Andogoly Guindo : L’une des actions
fortes de la Transition à signaler est la mise à la disposition des acteurs
d’une enveloppe de 700 millions de
Fcfa en vue d’atténuer les effets de la crise sanitaire liée à la pandémie de
la Covid-19.
Dans le secteur de l’artisanat, on peut citer
la tenue de la 3ème édition du Salon international de l’artisanat du Mali
(SIAMA), la vulgarisation du règlement N°01/2014/CM UEMOA du 27 mars 2014
portant code communautaire de l’artisanat de l’UEMOA et des textes du Réseau
des chambres de métiers, la poursuite des travaux de construction du siège du
Centre de développement de l’artisanat textile (CDAT) et des travaux du projet
d’extension de l’APCMM.
Dans le domaine de la coopération culturelle,
nous avons conduit une mission de travail à Abuja dans le cadre du CODEPA en
octobre 2021. Au niveau de la protection et de la promotion de l’héritage
culturel, nous avons réussi à faire adopter, en conseil des ministres, le
dossier de classement dans le patrimoine culturel national des Alliances et des
parentés à plaisanterie «Sinankouya » et l’inscription sur la liste
du patrimoine culturel immatériel de l’UNESCO nécessitant une sauvegarde
urgente, des pratiques et expressions culturelles liées au «M’bolon», instrument
de musique traditionnel à percussion.
Il y a aussi eu une exposition au Centre
culturel Korè de Ségou sur « la musique traditionnelle malienne, facteur
de préservation d’identité et de cohésion sociale ». Nous avons réceptionné
le 7 décembre 2021 plus de 900 objets ethnographiques et archéologiques du
Mali, issus du pillage et du trafic illicite en provenance des états-Unis d’Amérique et
lancé le 26 décembre 2021, le projet de
conservation, revitalisation et valorisation du textile au Centre du Mali dans
les localités de Bandiagara et de Djenné, avec un financement du Fonds des
ambassadeurs pour la préservation de la culture (AFCP).
Au niveau de la promotion de l’industrie cinématographique,
nous avons présidé la cérémonie de remise des prix de la 2ème édition 2021 «Cinema
et Citoyennetés» pour le financement de 7 œuvres cinématographiques et
audiovisuelles par le Fonds d’appui à l’industrie cinématographique.
Aussi, dans le cadre de la célébration de la
Journée mondiale du Livre et du Droit d’auteur 2021, nous avons remis à notre
collègue de la Défense et des Anciens combattants, pour le compte du Prytanée
militaire et du Musée des armées, des livres achetés auprès des éditeurs
maliens.
Au nombre des activités phares du département,
nous notons aussi l’organisation de «La Nuit de la paix», tenue dans la nuit du
21 septembre 2021. Dans les secteurs de l’hôtellerie, du tourisme et de la
restauration, il faut retenir l’élaboration du document de Politique nationale du tourisme, de l’hôtellerie
et de la tenue d’un atelier de formation des opérateurs de l’hôtellerie et de
la restauration sur les normes d’hygiène et de sécurité sanitaire des aliments,
tenu à Bamako, du 10 au 11 janvier 2022.
L’Essor : Les dossiers de la délocalisation de
l’Institut national des arts (INA), du Grand Théâtre de Bamako et du
Conservatoire des arts et métiers multimédia Balla Fasséké Kouyaté reviennent
dans les débats au Conseil national de Transition (CNT). Où en est-on avec ces
dossiers ?
Andogoly Guindo : La décision de la relocalisation
de l’Institut national des arts, la réalisation du Grand théâtre de Bamako et
la relecture des programmes de formation du Conservatoire des arts et métiers
multimédia Balla Fasséké Kouyaté sont des chantiers ambitieux de l’État confiés
à mon département. L’INA est une vieille école, le CNT a été invité à constater
de visu l’état d’occupation anarchique du site actuel. L’environnement dans
lequel se trouve l’école, la promiscuité avec le marché et la Grande Mosquée de
Bamako ne rendent pas facile le processus d’enseignement/apprentissage dans des
conditions idoines.
Le dossier INA va de pair avec le projet de réalisation du
Grand théâtre du Bamako. Il s’agit de réaliser en effet, une infrastructure qui
prenne en compte les évolutions technologiques et techniques dans les offres de
formation des élites des Arts et de la culture. Ce qui exige la réalisation
d’une infrastructure répondant à des normes internationales.
Le ministère de la Culture a demandé et obtenu auprès de
son collègue du Domaine, en lien avec l’Agence nationale de l’aviation civile,
une parcelle de 3 ha dans la zone aéroportuaire pour la réalisation du nouveau
bâtiment de l’Institut national des arts. Le processus de formalisation du
titre foncier n’est pas effectif. Le coût des travaux est évalué à 2, 52 milliards de Fcfa environ, pris en charge entièrement par une
société de la place avec laquelle, le ministère a signé en 2019, une convention
de cession, qui fait office de cahier de charges.
Ce montant équivaut à la
valeur vénale du titre foncier actuel de l’INA, après une évaluation faite par
des experts indépendants commis pour l’occasion. Le titre foncier actuel
pourrait alors être cédé à ladite société en contrepartie de la réalisation de
la nouvelle infrastructure, en cours de réalisation, dans la Zone aéroportuaire.
La réalisation du Grand Théâtre de Bamako est
une des priorités du gouvernement du Mali dans le cadre de la mise en œuvre de
la politique culturelle du Mali. Il s’agit d’une infrastructure culturelle
futuriste, alliant prouesses techniques et technologiques, dans le respect des
normes architecturales et environnementales et inspirée des techniques issues
du patrimoine culturel et architectural national.
Le projet a été conçu en 2017
et soumis pour financement au président de la République de Turquie lors de sa
visite au Mali en mars 2018. Dans le projet initial dont le coût de réalisation
est estimé à 40 milliards de nos francs, il est prévu, outre un Grand Théâtre
de 12.000m2, un amphithéâtre de 1.000 places, des espaces d’exposition
permanente et temporaire, un shopping hub, une promenade dite Soundiata.
Afin que le projet puisse voir le jour, le département
en charge du Domaine a été consulté pour la mise à disposition d’une parcelle.
Une zone d’une superficie de 10 hectares dont 6 hectares pour le Grand Théâtre
avait été proposée au ministère en charge de la Culture sur le flanc de la
colline du Point G, près du Conservatoire. Le ministère de l’Environnement a émis
des réserves puisque l’espace identifié se situe en plein cœur de la forêt
classée de Koulouba et dont il est impossible de changer la vocation.
D’autres
sites seront, par la suite, identifiés, comme la zone aéroportuaire. Le choix
final a été la place du Cinquantenaire, en face de l’École normale supérieure,
au bord du fleuve Niger. Un espace vaste de 4 hectares. La maquette du Grand Théâtre,
réalisée par un bureau d’études indépendant, prévoit qu’une partie des
infrastructures sera flottante. Des experts en environnement ont donné leur avis
favorable à la réalisation du joyau qui ne portera pas d’atteinte à l’intégrité
physique du fleuve.
La réalisation du Grand Théâtre permet de résorber
un besoin crucial en infrastructures de spectacle dans la ville de Bamako, qui
ne compte plus véritablement que le Centre international de conférences de
Bamako. Le palais de la Culture ne répondant plus aux besoins de la population,
le Grand Théâtre permettra surtout l’élévation, l’éclosion et l’explosion de
talents chez les jeunes, dans un monde en perpétuel essor sur le plan culturel
et technologique.
Le Grand Théâtre de Bamako devrait exprimer le génie d’un
peuple dont la Culture a résisté à l’usure du temps. Elle symbolisera
l’enracinement dans un passé brillant, des défis du temps et la projection vers
un futur prometteur. La Cité de la Culture de Bamako, un des grands projets
structurants du second quinquennat du président de la République, incarnera les
valeurs de paix, de cohésion sociale, de vivre ensemble et d’embellissement de
la capitale.
Créé par
la loi n°03-013 du 14 juillet 2003, le Conservatoire des arts et métiers multimédia
Balla Fasséké Kouyaté est un établissement public à caractère scientifique,
technologique et culturel. Son organisation et ses modalités de fonctionnement
sont fixées par le décret n°03-330/P-RM du 06 août 2003. Il a pour mission
d’assurer la formation des cadres supérieurs dans le domaine des arts et métiers
multimédia.
La quinzaine d’années de pratique du Conservatoire a, certes
enregistré des résultats appréciables, notamment la formation de ressources
humaines de qualité et la promotion artistique et culturelle du pays, mais, a
mis à nu les insuffisances et lacunes des textes, notamment l’absence de départements
d’enseignement et de recherche (DER) ou d’Unité de formation et de recherche,
de conseil scientifique et pédagogique, de mécanismes fiables de génération de
ressources propres.
En vue de combler ces insuffisances, le
conseil des ministres du 2 novembre 2018 a adopté le projet de loi portant création
du Conservatoire des arts et métiers Multimédia Balla Fasséké Kouyaté et le
projet de décret fixant l’organisation et les modalités de fonctionnement.
Le projet de loi déposé sur la table de
l’Assemblée nationale en décembre 2018 a fait l’objet de plusieurs écoutes devant
la Commission Éducation, culture et technologie dont celles des ministres chargés
de la Culture et de l’Enseignement supérieur.
L’Établissement qui formait jusqu’en DESS a
connu des mutations avec le basculement du Mali dans le système LMD, à l’instar
des autres institutions d’enseignement supérieur membres du Réseau pour
l’excellence de l’enseignement supérieur en Afrique de l’Ouest (REESAO).
Une réforme qui implique renforcement des capacités des enseignants-chercheurs
sur l’approche basée sur les compétences comme nouvelle alternative dans le développement
de curricula dans le cadre du LMD.
Propos recueillis par Dieudonné DIAMA
Dieudonné DIAMA
Ce processus qui se veut sans interférence extérieure, vise à amener nos compatriotes à discuter des préoccupations essentielles, à se pardonner et se réconcilier. La phase communale, tenue du 13 au 15 avril, a suscité une grande mobilisation des populations qui sont venues exprimer leurs po.
Les travaux ont été lancés lundi dernier. La session planchera notamment sur les projets de code pénal et de code de procédure pénale et ceux relatifs au financement des projets de renforcement du réseau électrique et d’extension de l’accès à l’électricité.
La tenue du Dialogue inter-Maliens a été annoncée par le président de la Transition, le colonel Assimi Goïta, lors de son adresse à la nation le 31 décembre dernier. Elle vise à sortir définitivement notre pays du cycle de la violence, mais aussi de la haine et de l’intolérance.
Le 6è vice-président du Conseil national de Transition (CNT), Hamidou Traoré, président délégué à l’Union interparlementaire (UIP), a porté la voix du Mali à la 148è assemblée de cette organisation. Il était accompagné par d’autres membres de l’organe législatif..
Le 6è vice-président du Conseil national de Transition (CNT), Hamidou Traoré, président délégué à l’Union interparlementaire (UIP), a porté la voix du Mali à la 148è assemblée de cette organisation. Il était accompagné par d’autres membres de l’organe législatif..
Le colonel Assimi Goïta a lancé cet appel lors d’une interview accordée à la presse après avoir déposé une gerbe de fleurs au monument des Martyrs. Il a saisi l’occasion pour féliciter et remercier toutes les Maliennes et tous les Maliens pour leur résilience face aux multiples défis.