
L’Essor : Quel regard portez-vous sur la situation
sociopolitique du Mali, un an et demi après le changement dont le Mouvement du
5 Juin-Rassemblement des forces patriotiques (M5-RFP) a été un acteur majeur ?
Oumarou Diarra : Je remercie le bon Dieu qui nous a
permis de vivre ces temps combien difficiles et qui continue à nous assister,
Inshaa Allah, pour le plus grand bonheur
de notre peuple. Je vous avoue que le Mali avait atteint un niveau où la
gestion au haut sommet de l’état était presque catastrophique. La confiance
entre les gouvernants et les gouvernés n’y était plus. Aussi, la corruption
avait atteint un niveau extraordinaire depuis plus d’une décennie.
Donc, il
fallait rétablir cette confiance entre le peuple et les dirigeants. En ce sens,
c’est un sentiment de fierté pour moi d’abord d’avoir participé à ce grand
mouvement de changement au niveau de notre pays, qui est le M5-RFP.
La rectification de la Transition, survenue le 24 mai 2021,
a contribué encore plus à rapprocher les positions entre les principales forces
du changement. Dès lors, il y a eu un gouvernement conduit par le M5-RFP, à sa
tête Dr Choguel Kokalla Maïga. Aujourd’hui, force est de constater qu’au niveau
du sommet de l’état, les Maliens se sentent aujourd’hui beaucoup plus gouvernés
par des hommes et des femmes qui veulent réellement aider le pays à s’en
sortir.
L’autorité de l’état s’installe auprès de la population et l’espoir est
également revenu aux Maliens que le changement est possible. Sans espoir, la
vie n’a pas de sens. Il y a aussi la multiplication des partenariats. Nous
sommes parvenus, quelque part, à imposer le respect dû à notre nation. Ce sont
des avancées importantes et des acquis de la Transition.
L’Essor : Les Assises nationales de la refondation viennent
de se tenir dans notre pays. Les conclusions de cette rencontre sont-elles
conformes aux aspirations qui ont sous-tendu la lutte que les Maliens ont menée
en 2020 ?
Oumarou Diarra : Les Assises nationales de la refondation
faisaient partie des revendications phares du M5-RFP. Bien avant le M5-RFF, en
2018, après les crises post-électorales, la Cedeao avait fortement déconseillé
au président d’alors d’aller à une autre élection sans les réformes. Donc, les
ANR étaient beaucoup plus nécessaires non seulement pour impliquer l’ensemble
des forces vives de la Nation dans la gestion de leur pays.
Mais aussi prendre
en compte les propositions et revendications des politiques, de la société
civile, des religieux, en un mot, l’ensemble des Maliens. Ce fut l’occasion
pour les Maliens de se retrouver, pour parler de leur pays. Les conclusions tirées
de ces Assises seront exécutoires, selon la volonté du président de la
Transition et des forces du changement.
En résumé, je pense qu’aujourd’hui plus que jamais, la
majorité écrasante des Maliens est d’accord que l’espoir est revenu et que nous
devons tous regarder dans la même direction afin de sauver l’essentiel d’abord,
c’est-à-dire le Mali. Si j’ai un message à lancer à l’ensemble du peuple
malien, c’est de renforcer cette nouvelle dynamique de patriotisme, de
l’engagement pour le devenir de notre nation. Mais aussi de continuer à
soutenir la montée en puissance de nos FAMa qui sont en train aujourd’hui, grâce
à l’acquisition de nouveaux équipements et surtout à la diversification des
partenaires, de faire venir la stabilité petit à petit dans le pays.
En tant
que ministre en charge de l’Action humanitaire, je suis mieux placé pour faire
ce constat sur le terrain. De décembre à nos jours, nous sommes passés de
400.000 déplacés internes à 350.000, soit plus de 51.000 déplacés internes de
retour sur les sites d’origine et de manière spontanée et surtout volontaire.
Tout cela va nous permettre, non seulement d’instaurer la sécurité, mais également
d’aller vers ces réformes qui vont forcément nous conduire à l’organisation
d’une élection crédible et transparente pour un retour à l’ordre
constitutionnel tant souhaité par le peuple malien.
L’Essor : Créer les conditions favorables au retour des déplacés
et réfugiés est l’une priorité de l’axe 4 du Plan d’actions du gouvernement.
Quelles sont, à ce jour, les actions menées par votre département pour
atteindre cet objectif ?
Oumarou Diarra : Il existe des initiatives dans ce domaine.
D’abord, les instructions du président de la Transition relatives aux
dispositions à prendre pour le retour de nos compatriotes réfugiés dans les
pays voisins et les personnes déplacées internes vivant en dehors de leur lieu
habituel de résidence, que tous ceux-ci rentrent dans la dignité au bercail.
En exécution de cette
instruction, les initiatives sont en cours par mon département à travers la
mise en œuvre des accords tripartites relatives au retour volontaire dans la
dignité de nos compatriotes résidents au Burkina Faso, au Niger et en
Mauritanie. Aussi, au niveau des personnes déplacées internes, en plus des
appuis alimentaires et en non vivres réguliers faits par l’état et ses
partenaires, des dispositions sont en cours pour l’aménagement de sites plus
proches de leurs lieux de résidence. Et tout cela dans un accompagnement sécurisé.
Pour accompagner le retour des réfugiés, le département a aménagé
plus d’une vingtaine de sites d’accueil et
approvisionné en vivres et non vivres les localités concernées. La
responsabilité institutionnelle de l’état s’affirme en premier en tant que
catalyseur, facilitateur, coordonnateur et incitateur de toutes les
initiatives, stratégies et actions concrètes,
individuelles et collectives.
Mais aussi de l’organisation de la
solidarité nationale allant dans le sens de l’amélioration des conditions de vie et la protection des
personnes et communautés affectées et au renforcement de l’espace humanitaire
et de la coordination de ses interventions. Pour parer à la vulnérabilité, la
précarité économique et l’incertitude quant à la capacité de faire face aux événements
imprévus, le département mobilisera toutes les énergies en matière de développement
social, d’actions humanitaires et de solidarité pour venir en appui aux groupes
vulnérables notamment les femmes seules chargées de famille, les enfants
en situation difficile, les enfants de la rue, les personnes âgées vulnérables,
les personnes démunies vivant avec un handicap.
Aussi, le gouvernement
contribuera à assurer une meilleure couverture des prestations sociales, à
assurer la prise en charge socio-sanitaire des couches les plus pauvres et à étendre
la couverture sociale aux populations non couvertes par les régimes publics de
protection sociale.
Les populations restées sur place, les personnes déplacées,
les personnes retournées bénéficieront de l’organisation d’une synergie
d’actions au plan national en vue de mettre ensemble les acteurs humanitaires
dans la réponse efficace afin de sauver des vies humaines, soulager des enfants
et des femmes, leur donner espoir, tel est le sens et la signification de la
mission de mon département en fait : le droit de vivre.
L’Essor : Quelques mots sur les contraintes et les perspectives du département que vous dirigez.
Oumarou Diarra : L’un de mes grands projets est la mise en
place d’une Agence humanitaire qui aura pour missions d’examiner toutes
les questions relatives à l’action humanitaire ; d’assurer la synergie
entre les actions du gouvernement et celle des partenaires ; de fédérer
les initiatives et efforts de mobilisation de ressources nécessaires à l’action
humanitaire ; de promouvoir le renforcement des capacités des
organisations à caractère humanitaire.
Mais aussi de proposer au gouvernement
toute mesure visant à prévenir et à prendre en charge les victimes de crise
humanitaire ainsi que de veiller à la bonne application des principes et
du code de bonne conduite de l’action humanitaire au Mali. En termes de
perspectives, nous souhaitons avoir une vision globale et exhaustive sur
les interventions à planifier par l’état et les partenaires ; optimiser
les moyens humains et financiers et identifier comment les moyens sont utilisés
et pour quel résultat ; maîtriser le temps de mise en œuvre, grâce à une
planification rigoureuse ; trouver des solutions de repli en étant
capable d’analyser les conséquences sur les autres actions et avoir une
meilleure coordination lorsque des dépendances existent entre les actions.
Propos recueillis par
Massa SIDIBÉ
Massa SIDIBE
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