L’Essor : Pouvez-vous nous expliquer les mécanismes du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme ?
Yaya Traoré : Les mécanismes de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme au Mali reposent sur un cadre juridique en grande partie issu de la réglementation de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa) et sur des entités spécialisées. Ce cadre juridique s’appuie sur les normes internationales, en particulier les 40 recommandations du GAFI dont la mise en œuvre par les États est une exigence.
L’ordonnance n°2024-011/PT-RM du 30 août 2024 portant lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et la prolifération des armes de destruction massive (BC/FT/FP) est le texte principal du dispositif normatif national. Ce texte résulte de la transposition de la «Directive n°01/2023/CM/Uemoa du 15 mars 2023 de l’Uemoa» et est pris suivant les exigences des normes internationales, notamment les 40 recommandations du GAFI. Il existe d’autres textes de nature réglementaire qui viennent appuyer et favoriser la mise en œuvre des dispositions de cette ordonnance.
La lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme est principalement effectuée par des organismes publics spécialisés et une catégorie de professionnels appelés assujettis à la LBC/FT/FP. Cette lutte met l’accent sur la prévention, et c’est pourquoi l’ordonnance de 2024 a défini des obligations que les assujettis doivent observer dans le cadre de l’exercice de leurs activités professionnelles. Les règles basiques de prévention contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme reposent sur l’approche basée sur les risques, la coordination, les mesures préventives, la coopération internationale et la répression pénale.
Le dispositif de lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et la prolifération des armes de destruction massive (BC/FT/FP) du Mali avait été jugé, en 2019, comme non conforme aux normes suite à l’évaluation mutuelle. Ce qui avait eu pour conséquence la mise du Mali sur la liste grise du GAFI en octobre 2021. Après, un travail acharné des différents acteurs engagés dans cette lutte, au mois de juin passé, le Mali est sorti de cette liste grise. Ce qui atteste que le Mali dispose actuellement d’un dispositif LBC/FT/FP robuste et efficace.
L’Essor : Quels sont les acteurs impliqués dans cette lutte au Mali ?
Yaya Traoré : Les acteurs clés sont le Comité national de coordination des activités de LBC/FT/FP (CONACA) qui a pour missions principales d’assister les pouvoirs publics dans la conception et la conduite de la Politique nationale de LBC/FT/FP, de coordonner l’évaluation nationale des risques (ENR), de formuler des recommandations pour l’amélioration du dispositif juridique et institutionnel. La Centif est l’autorité chargée du renseignement des informations financières. Son rôle principal est la collecte, l’analyse et le traitement des informations financières liées aux opérations suspectes.
À ce titre, la Cellule est chargée de recevoir et d’analyser les déclarations d’opérations suspectes transmises par les assujettis (banques, assurances, notaires, etc.), de mener des analyses approfondies pour déterminer si les transactions sont susceptibles d’être liées au blanchiment d’argent ou au financement du terrorisme, et de transmettre les rapports d’analyse motivés aux autorités judiciaires compétentes si des indices de BC/FT sont établis, afin de permettre l’ouverture des poursuites. On a également la Commission consultative sur le gel administratif (CCGA) en matière de LBC/FT/FP, l’organe technique qui assiste l’Autorité compétente (le ministre chargé des Finances) dans l’application des sanctions financières ciblées (SFC) en matière de LBC/FT/FP.
L’Essor : Quelles sont les mesures de prévention que les institutions financières peuvent mettre en place pour lutter contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme ?
Yaya Traoré : Pour lutter contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, la loi a institué des obligations que les institutions financières doivent observer, afin d’atténuer les risques de commission de ces infractions. Parmi ces obligations, on peut citer, entre autres, l’obligation de disposer de politiques, de procédures et de mesures de contrôle LBC/FT/FP, l’obligation de faire une évaluation de risque BC/FT de sa clientèle. Il y aussi l’obligation de connaître son client (KYC) au début, en cours et à la fin de la relation d’affaires et celle de conserver les documents de sa clientèle pendant 10 ans et de faire des déclarations d’opérations suspectes immédiatement à la Centif après le constat d’un risque de blanchiment de capitaux ou de financement du terrorisme.
L’Essor : La coopération internationale est-elle importante dans la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme ?
Yaya Traoré : La coopération internationale est une exigence de la loi LBC/FT/FP et des normes du GAFI, parce que le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme sont des infractions dont les éléments constitutifs peuvent dépasser le cadre d’un seul pays.
L’Essor : Quelles sont les conséquences pour les individus et les institutions qui se livrent au blanchiment de capitaux et au financement du terrorisme ?
Yaya Traoré : Les conséquences sont des poursuites judiciaires, le gel, la saisie et la confiscation de leurs biens.
L’Essor : Quelles sont les sanctions pénales et administratives prévues par la loi en la matière ?
Yaya Traoré : En cas de condamnation pour blanchiment de capitaux, la personne physique encourt 3 à 7 ans, et 10 ans de prison en cas de circonstances aggravantes. L’amende est égale au triple de la valeur des biens ou des fonds sur lesquels ont porté les opérations, et au quintuple en cas de circonstances aggravantes. Pour les personnes morales, le montant de l’amende est égal au quintuple de celui prévu pour les personnes physiques ; en cas de circonstances aggravantes, au quintuple du quintuple de la valeur des biens.
La personne morale peut être dissoute ou interdite d’exercer directement ou indirectement l’activité professionnelle ou sociale ou à l’occasion de laquelle l’infraction a été commise, pour une durée allant de 3 à 6 ans. En cas de condamnation pour financement du terrorisme, la personne physique encourt 5 à 10 ans et une amende égale au moins au quintuple de la valeur des biens ou des fonds sur lesquels ont porté les opérations. En cas de circonstances aggravantes, les peines sont doublées.
L’Essor : Quelles sont les lois et réglementations en vigueur pour lutter contre ces activités ?
Yaya Traoré : En la matière, il existe une batterie de textes. Nous avons le Livre de procédures fiscales modifié par la loi n°049 du 31 août 2023 ; la loi n°2013-031 du 23 juillet 2013 portant approbation du Code de transparence de la gestion des finances publiques ; la loi n°2014-015 du 27 mai 2014 portant prévention et répression de l’enrichissement illicite.
Outre la loi n°2022-048 du 23 novembre 2022 portant modification et ratification des attributions de l’Agence de recouvrement et de gestion des avoirs saisis ou confisqués (AGRASC), l’ordonnance n°2024-011/PT-RM du 30 août 2024 modifiée portant lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et la prolifération des armes de destruction massive ; on note le décret n°07-291/PRM du 10 août 2007 fixant l’organisation et les modalités de financement de la Cellule nationale de traitement des informations financières.
Autres textes : le décret n°2021-682/PT-RM du 24 septembre 2021 modifié portant désignation de l’autorité compétente et définition de la procédure en matière de gel administratif dans le cadre de la lutte contre le financement du terrorisme et la prolifération des armes de destruction massive ; l’arrêté interministériel n°2023-4609/MEF-MJDH-MM-SG du 29 décembre 2023 portant formulaire des bénéficiaires effectifs des personnes morales ; la décision n°2022-00090/MEF-SG du 22 novembre 2022 portant désignation des membres de la Commission consultative de gel administratif en matière de lutte contre le financement du terrorisme et la prolifération des armes de destruction massive. Il y a également le décret n°2022-0107/PT-RM du 22 février 2022 instituant le registre public des bénéficiaires effectifs des entreprises extractives.
Interview réalisée par
Babba COULIBALY
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