
Procéder à l’observation rigoureuse du téré devient un préalable obligé lorsqu’une intention de mariage est exprimée (archives)
D’ailleurs, ne dit-on pas chez les Bambara : «Mogo téré tè i yéré nò yé» pour dire, littéralement, que personne ne décide de la positivité ou de la négativité du présage. Pour mesurer à quel point le présage est ancré de manière indéracinable dans notre quotidien, il faut notamment s’intéresser au processus du mariage dans les différents milieux culturels de notre pays. Ainsi, aussitôt qu’une intention de mariage est exprimée chez les Sénoufo ou chez les Soninké, les Dogon, les Bwa, les Bambara, les Sonrhaï, etc., procéder à l’observation rigoureuse du téré devient un préalable obligé dont la responsabilité incombe aux parents des deux bords familiaux.
Le prétendant de notre fille, a-t-il un téré auréolé d’embellie ? Ou encore, cette fille que notre garçon veut épouser, n’a-t-elle pas un téré qui interdit toute union avec elle ? Ce sont là des interrogations qui assaillent des millions de parents au Mali dès lors que le mot «fiançailles» sort de la bouche d’un des leurs. Le téré, que d’aucuns qualifient de «démarche superstitieuse», est donc une considération à laquelle les Maliens sont viscéralement attachés. Il fait référence aux signes et gestes corporels prédisant des choses positives ou négatives dans la vie d’une personne et qui risquent de rejaillir sur son futur conjoint ou conjointe.
Nouhoum Cissé, traditionnaliste et comédien, nous explique : «La question du téré est une réalité qui existe chez les Hommes.» Selon lui, traditionnellement, chaque personne a son présage qui définit son totem. «Il y a des gens qui ne peuvent pas avoir de bonheur au bord du fleuve. En revanche, d’autres n’ont pas intérêt à vivre sur les montagnes. Cela est dû à leur téré. C’est pourquoi, avant de se lancer dans n’importe quelle entreprise, l’être humain doit toujours consulter des traditionnalistes», poursuit-il.
«Avant tout mariage, il faut impérativement consulter les oracles, sinon les futurs époux risquent de fonder un foyer baigné dans le malheur. Ou encore, ils peuvent former un couple qui n’aura pas de bonheur ou ne vivra pas longtemps. Nos aïeux, eux, s’efforçaient de cerner le téré de chaque futur(e) époux et épouse, avant de célébrer l’union de deux personnes», explique le traditionnaliste et comédien. Concrètement, comment se manifeste le téré et à quels signes distinctifs faut-il se fier pour le détecter chez quelqu’un ? Nouhoum Cissé nous avertit : «Un homme peut se marier avec une femme qui est porteuse de bon présage.
Après quelques années de mariage, l’époux peut connaître le bonheur, notamment en devenant riche. Il va penser à se marier à une deuxième femme mais qui peut lui apporter le malheur dans le foyer.»
MAUVAIS PRESAGE- Pourquoi ? «Eh bien ! Parce que la seconde épouse a certainement un mauvais présage. Les hommes doivent tenir compte cela. Nous pouvons également découvrir le présage d’une personne à travers ses démarches, ainsi qu’à travers son visage», nous dit-il doctement.
Le traditionnaliste éclaire notre lanterne sur une confusion très fréquente. «Téré et dolo (étoile) ne doivent pas être confondus», souligne-t-il. Et Cissé de démêler l’affaire : «Le présage est une réalité à ne pas confondre avec le «dolo». Chaque personne a sa source de création. Certaines personnes sont faites à base du feu, d’autres, à base d’eau, d’autres encore sont conçues à base de terre. Dans ce cas, ce sera difficile pour des gens de source de création différente de faire un couple heureux.»
Notre traditionnaliste, en homme attaché aux us et coutumes maliennes, insiste sur l’importance à accorder aux pratiques divinatoires, à chaque fois que l’on doit entreprendre quelque chose. «Je peux dire que toute personne ou encore tout objet peut avoir de mauvais présage, Pour éviter de rencontrer un malheur, il faut toujours faire des consultations traditionnelles, exactement comme le faisaient nos aïeux», fait comprendre Nouhoum Cissé dit Bagnago. Le Dr Fodé Moussa Sidibé, enseignant-chercheur et écrivain, un autre connaisseur du Mali des traditions, nous a fait bénéficier de ses éclairages. Dr Sidibé, un des intellectuels maliens qui s’intéressent énormément aux valeurs du terroir, au risque de contredire les explications communément admises, précise qu’il ne faut pas forcément chercher à faire du mot français «présage» l’équivalent du «téré» bambara.
Il s’en explique : «Il ne faut pas obligatoirement traduire certaines de nos valeurs, car elles n’ont pas toujours d’équivalence en langue française. Dans tous les cas, il n’y a aucun mot français que je connaisse, qui définisse le «téré». Ce n’est pas le présage, ni la prémonition», dit-il. Il précise également que pour parler du «téré», il faut savoir ce que sait. Et, selon lui, le «téré» est l’un des principes spirituels de l’humain.
Dans notre culture et civilisation, l’humain a des principes spirituels dont le «téré». Le «fari», qui est le corps humain ; le «ni», qui est l’âme ; le «nyama», qui est le flux vengeur, le «téré» et le wanzo, entrent tous dans le tableau de ces principes, selon le Dr Sidibé. Qui ajoute : «Chacun de ces principes a sa place dans la constitution, l’évolution et le devenir de l’être humain. Ces principes ont leur explication, implication et compréhension dans notre culture et non dans d’autres cultures et valeurs».
«Donc, à partir de cet instant, nous pouvons dire que le téré est considéré comme un élément avec lequel l’être humain vient au monde. Un principe qui constitue la personne humaine», ajoute-t-il. Deux parties- Dr Sidibé dit également que le téré est constitué de deux parties : «téré» négatif et «téré» positif. À ce niveau, il fait comprendre que ce sont les parents qui transmettent leurs «téré» à leurs enfants. Ce téré peut être influencé par le mode de conception de l’enfant et beaucoup d’autres choses.
Le «téré», par définition chez nous est transmissible ou contagieux. Le bon téré peut être transformé en mauvais… et vice versa. Ce qui demande beaucoup de sacrifice. Pour amoindrir le mauvais «téré» de quelqu’un, on peut lui demander de s’approprier un animal qui a un bon «téré». On vit avec son «téré» en faisant en sorte que, dans nos relations, personne ne nous transmette son mauvais téré.
Par exemple, la compagnie d’une personne qui a un mauvais «téré», peut influencer le bon «téré» de toutes les personnes autour d’elle.
Dr Sidibé, fervent chantre des valeurs ancestrales maliennes et africaines, emboîte ainsi le pas aux «anciens», les «makôrô», en bamanan. Ces makôro accordent tant de foi à la réalité du téré, qu’ils ne posent aucun acte sans avoir pris soin au préalable de jauger le téré. Rien ne se fait au gré du hasard, d’après les arguments brandis par les tenants de l’univers traditionnel et traditionnaliste malien. «Toutes les remarques de l’expression comportementale et corporelle étaient prises en compte», fait savoir Namokory Traoré, un chef de village dans la circonscription territoriale du Cercle de Kangaba (Ouest).
Le Makoro y va d’ailleurs de son conseil à l’attention de la jeune génération : «Contrairement à nos anciens, les jeunes d’aujourd’hui se marient n’importe comment et avec n’importe qui. Rares sont ceux qui tiennent compte du téré. Or, il y a de ces signes, quand on les apercevait chez une femme, nos anciens dissuadaient tout de suite l’homme qui souhaitait l’épouser. Cela, pour éviter des faits malheureux», prévient notre interlocuteur.
Nos interlocuteurs font noter que, dans la société malienne, la question du téré n’est pas l’apanage des femmes. Il ressort des détails recueillis auprès de nos spécialistes des traditions maliennes que les hommes, aussi, peuvent évoluer sous un bon ou mauvais augure. Comme pour dire que chaque être humain vient au monde avec son téré.
Sinè TRAORÉ
Moussa DIARRA
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La tendance à l’incrimination de la femme
Dans la majorité des cas, la question du téré s’intéresse beaucoup plus aux femmes qu’aux hommes, dans la société malienne. Ce qui fait que ce sont «Mesdames» qui sont toujours qualifiées de «femmes de mauvais ou bon téré». Pourquoi donc cette stigmatisation à presque toujours faire porter le poids du téré à la femme ? Seulement, on parle beaucoup plus de téré des femmes, «parce qu’elle est la base de notre société», souligne Dr Fodé Moussa Sidibé.
Selon lui, la femme est la génitrice et toutes les visions spirituelles prennent racine à partir d’elle. Donc, elle est l’élément central de notre société. «C’est pourquoi, on s’intéresse plus à son cas qu’à celui de l’homme», ajoute-t-il. Sinon, les hommes aussi ont des signes annonciateurs de bonheur ou de malheur. Il n’y a aucun humain sur cette terre qui n’ait de téré. Nous ne sommes pas les seules créatures de Dieu. Chaque créature de Dieu a un «dolo», en bambara, ce qui est différent du téré, précise Nouhoum Cissé.
Sinè TRAORE
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